<< va pillia ‘na cuczzedda lunga, che facimu la minestra >>.
Dans une casserole, elle mettait un peu tout et n’importe quoi, un peu dans n’importe quel ordre… Souvent trop cuit, quelque fois pas assez, et… c’était bon !
Elle s’appelait Rosalia. Parmi toutes ses recettes plus ou moins improvisées : ‘la minestra di cucuzzedda cu tinniruma’.
Des noms :
Dans la famille des cucurbitacées, les ‘lagenaria’ sont souvent nommées ‘calebasses’, en raison de la ressemblance de certaines variétés avec les fruits du calebassier, qui est un arbre de la famille de la bignone.
Les ‘lagenarias’ sont aussi appelées aussi ‘gourdes’. Ceux qui entendent l’occitan de Provence connaissent les ‘cougourles‘, parfois prononcées ‘cougourdes‘, une transformation dialectale du latin ‘cucurbita‘.
Synonymes (pour la variété ‘sirpente’) :
Lagenaria Sirpente di Sicilia, cuccuzza, ou cucuzzedda a raspare, cucuzzedda lunga, ou lunghissima, cuczzedda da pergola. Ces termes, je les connais en dialecte sicilien de Favara, petite ville proche d’Agrigente mais vous trouverez autant de variantes dialectales que d’hybrides du même fruit !
Vous noterez que cucuzza (et toutes les variantes) se traduit par le mot ‘courge’, et cucuzedda par courgette, même si nous ne parlons pas ici de ‘cucurbita pepo’.
Très répandue et utilisée au maghreb : le slaoui entre dans la composition de tajines au Maroc .
ITK
Ces cucurbitacées, comme tant d’autres, se plaisent dans des sols riches et bien hydratés.
Si on souhaite obtenir des fruits longs et bien droits, le mieux est de faire grimper les plantes sur une structure ou un arbre.
Si on les laisse courir au sol, elles serpenteront prenant une forme plus ou moins tortueuse.
J’aime bien leur construire une “cabane” d’environ 2,30 de hauteur, un peu au pif, en fonction des piquets ou des bambous disponibles. Si vous faites ce choix, prévoyez solide : la ramure et les fruits atteignent une masse considérable en fin de saison.
Semence
Pour être consommés, on ramasse les ‘cucuzze‘ à un moment où les graines sont encore tendres et pas encore bien formées. Pour reproduire la semence, il faut laisser le fruit venir à complète maturité, jusqu’au stade ou il durcit. Plusieurs façons : on oublie la cucuzza dans un endroit aéré et on attend qu’elle soit très sèche et dure. On ouvre, la plupart des graines tombent seules avec un peu de matière desséchée. Avec une baguette ou un petit tuteur, on peut gratter ce qui reste accroché à l’intérieur.
Sinon, on ouvre un fruit pas encore sec (mais plus consommable) pour récupérer les graines les mieux formées, qui ont souvent une couleur plus foncée.
Tinniruma, tennerume...
Connaissez-vous les brèdes ?
Dans l’océan indien, où l’on fait feu de tout bois…ou plutôt, où l’on fait légume de toute plante non toxique, on trouve sur les marchés des bottes de jeunes pousses diverses, parfois sauvages, vendues comme légumes verts, à l’instar de blettes ou d’épinards.
Les jeunes pointes de lagenaria sirpente sont utilisées de la sorte en Sicile et dans le sud de l’Italie.
Ajoutés à la la soupe, elles apportent un goût plus ou moins prononcé, en fonction de la proportion. Selon l’habitude, la soupe peut être de tinniruma avec une poignée de cucuzzedda, ou bien l’inverse.
Si la minestra di cucuzzedda fait quasiment l’unanimité autour de nous, il faut reconnaître que la version avec les jeunes pousses, qui a plus de caractère, est souvent moins appréciée.
Certains utilisent ces pousses comme légume vert, dans une brouillade d’oeufs, par exemple… c’est fort en goût.
Minestra di cucuzza (cu tinniruma, a piacere)
De la cuccuzza, il va de soit, avec des ‘tennerume’ si vous avez des plants dans le jardin.
De l’oignon, ‘a visto de nas’… (là c’est du patois cévenol)
Un féculent : quelque fois de la patate, d’autres fois de gros macaronis. Il m’arrive de verser la soupe brulante sur un reste de riz déjà cuit.
De l’huile d’olive, à la louche… je veux dire : au pifomètre.
1 ou deux tomate(s) bien mures, selon le goût.
Basilic, ail, à volonté.
Poivre et sel, point trop n’en faut.
Huile d’olive encore, mais crue.
Pecorino gratuggiato (non quello detto ‘romano’ ma quiddu fatto dai fratelli Taibi di Castrophilippo !).
Dans une casserole, à feu vif , mettre l’oignon ciselé à fondre dans l’huile d’olive.
Avant que ça ne brunisse, rajouter la cuccuzza en morceaux détaillés à votre convenance (avec la pomme de terre, si vous choisissez cette version).
Faire suer .
Saler.
Vous pouvez ajouter une ou deux gousses d’ail, à votre convenance, puis la tomate bien mure (si vous avez le temps d’ôter la peau et les pépins, c’est mieux).
Ajouter de l’eau bouillante, deux à trois fois le volume des légumes.
Porter à ébullition.
Option : ajouter les ‘tenneruma’.
Baisser le feu.
En fin de cuisson, ajouter quelques feuilles de basilic.
Rectifier l’assaisonnement.
Rajouter et laisser cuire les macaroni.
Avant se régaler : ajouter un trait d’huile d’olive crue dans le bol, et saupoudrer la minestra avec un peu de pecorino.
Cette soupe peut se faire avec les deux options : avec ou sans ‘tenneruma‘.
Le goût de ces jeunes pousses est assez particulier et prononcé. Cela plaît pas à tout le monde, et il faut retourner les cueillir au dernier moment… Alors souvent, on n’en met pas : la recette est plus douce, et plus unanimement appréciée.
Références :
Article ‘Lagenaria longissima’ sur Wikipédia.
L’émission “Comme une envie de jardin” tournée au Potager Extraordinaire à La Mothe Achard, en Vendée.
2 Responses
bonjour, merci pour toutes ces infos intéressantes. Elles tombent à pic car pas facile d’en
trouver en français. Juste une question, dans ka recette, faut il éplucher les slaouis ?
Bon dimanche
Hélène
Bonjour, oui on les épluche. Si les légumes sont jeunes et frais, un passage suffit. Si la peau est devenue un peu épaisse en raison d’un prélèvement un peu tardif, alors un deuxième passage peut s’avérer utile.